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Ce blog n’est pas de droite

Parce qu’il est important de réaffirmer que le féminisme radical ne laisse pas la place aux idéologies de droite, à la pseudo-science, et aux dérives idéologiques misogynes en général.


Par cet article, je souhaite réagir à des événements qui ont eu lieu dans le milieu radfem depuis l’automne 2022, mais dont je n’ai pris connaissance que récemment. Je souhaite également me positionner fermement contre les affiliations avec la droite dont les féministes radicales sont régulièrement accusées.

Sachez que ça me désole un peu de devoir répéter que non, le féminisme radical n’est pas de droite, nous sommes radicalement de gauche même si les accusations du contraire sont nombreuses. Mais puisqu’il faut le dire explicitement, je vais le dire.

Cet article traitera de trois éléments : L’affaire Wyylde, Dora Moutot, Marguerite Stern & les Amazones. Prenez-le comme un positionnement officiel.

L’affaire Wyylde

Wyylde est un site échangiste qui, en octobre 2022, a été dénoncé par le Collectif Abolition Porno-Prostitution (CAPP) dans un post Facebook suite à une enquête d’une des membres. Le site se veut progressiste, féministe même, et a fait une promotion agressive dans l’espace public. De nombreux témoignages ont indiqué que le site est dangereux, ne vérifie pas les membres, héberge des groupes racistes et ouvertement violents. D’après l’enquête de CAPP, il a été impliqué dans au moins une affaire judiciaire avant de changer de nom pour éviter la mauvaise publicité.

L’existence de ce site est entrée dans les radars des survivantes de la prostitution suite à son partenariat rémunéré avec Dora Moutot, considérée comme une figure du féminisme radical. J’y reviendrai dans la suite de l’article.

Dans les posts Instagram en partenariat avec Wyylde, on peut lire que ce site est un bon endroit pour permettre aux femmes de réaliser leurs fantasmes, avec des descriptions fortement fétichistes. Les posts invitent notamment à utiliser d’autres femmes sans leur consentement, encourage l’idée que douleur = plaisir, et fétichise ouvertement l’homosexualité masculine et les hommes bisexuels.

Dans les commentaires, on trouve de rares personnes qui critiquent le contenu des posts, notamment la fétichisation des relations entre hommes et des massages tantriques, mais aussi quelques personnes qui glorifient la prostitution et la pornographie.

Comme si ce n’était pas suffisant, de nombreuses survivantes ont alerté dans les commentaires que ce site n’était pas safe, qu’elles avaient été trafiquées sur ce site et que les hommes l’utilisaient pour prostituer leur compagne, avec des groupes dédiés à cette pratique. Tous ces commentaires ont été supprimés, systématiquement, ce qui fait qu’il n’en reste aujourd’hui aucune trace. Une amie survivante m’a dit avoir personnellement mit un commentaire, qui a lui-aussi été supprimé.

Au vu de la culpabilité apparente de Wyylde, CAPP a donc appelé les féministes radicales à se désolidariser de Dora Moutot et du site Femelliste, co-fondé avec Marguerite Stern. Cette annonce de leur propre désolidarisation avec ces deux figures du féministe radical français a été mal pris par les femmes militantes des Amazones, à la base créées par Marguerite. Elles ont affirmé que Marguerite n’avait rien à voir là-dedans et ne méritait pas d’être associée de cette manière à Wyylde malgré son partenariat officiel avec Dora, et ont accusé les survivantes d’aller trop loin. Se sont ensuite des accusations de harcèlement envers des membres de CAPP, poussant le collectif à se désolidariser entièrement de l’Amazone.

A ce jour, des survivantes de CAPP ayant témoigné de leur vécu pour le podcast de Marguerite ont demandé à ce que leur témoignage soit retiré mais n’ont toujours pas reçu de réponse, ce qui signifie que Marguerite continue de profiter du contenu qu’elles ont partagé.

Face aux accusations reçues autour de ce qui était perçu par les militantes de l’Amazone comme un simple désaccord, Daria Kovankha, survivante de la prostitution et militante du CAPP, s’est exprimée dans un long post facebook pour mieux expliquer le positionnement prit par le collectif. Je reviendrai sur les réactions des Amazones dans la troisième partie.

Dora Moutot

Aux yeux de la plupart des gens, y compris des activistes trans, Dora est une figure du féminisme radical. Elle est harcelée depuis des années par des militants trans pour avoir questionné leur doctrine. Ce harcèlement a commencé à cause du compte Instagram aggressively_trans, tenu par un homme trans-identifié. Dora a été défendue par nombre de féministes radicales, moi y compris. Aujourd’hui, Stop Homophobie et Mousse ont porté plainte contre elle pour avoir qualifié Marie-Cau d’homme transféminin (ce qu’il est), et pour avoir dit que les femmes sont obligées de se méfier des « personnes à pénis » lors de l’émission « Quelle époque ! » sur France 2.

Lassée par tout ce harcèlement, elle a lancé avec Marguerite Stern le site Femelliste, pour rassembler des opinions de féministes radicales critiques de l’idéologie trans.

A ce stade, il est important de préciser que Dora Moutot n’est PAS une féministe radicale. Elle ne prétend d’ailleurs pas l’être, se contentant de défendre les femmes sur la base du sexe contre l’idéologie du genre. Sa position est avant tout capitaliste, car elle tient le compte sexo tasjoui sur Instagram et se doit donc de vendre des produits pour continuer à gagner de l’argent. Dans son livre Mâle-Baisées, elle relate avoir fait appel aux services d’une thérapeute du sexe (p. 185), donc à une forme de prostitution, et défend la pornographie et le BDSM, deux positions totalement incompatibles avec le féminisme radical. Ces éléments de son livre ont d’ailleurs déjà été critiqué par les membres de CAPP.

Dora a donc accepté un partenariat avec Wyylde, site échangiste, pour son compte Instagram tasjoui, dédié à la sexualité des femmes hétéros. Ce n’est pas surprenant puisque c’est exactement le type de compte que recherchait Wyylde. Le problème, encore une fois, réside dans la censure et le refus d’écouter les survivantes. Par ces actions, Dora a prouvé qu’elle n’était pas féministe, et il est donc raisonnable de se désolidariser d’elle. Une position qui est difficile à avaler pour de nombreuses féministes qui se disent pourtant abolitionnistes.

Marguerite Stern & les Amazones

A ce jour, Dora Moutot a bloqué mon compte sur Instagram sans aucun avertissement. Nous avions pourtant échangé plusieurs fois, amicalement, et j’étais venue la rencontrer lors d’une séance de dédicaces à Paris (même si je n’avais finalement pas pu lui parler). La raison de ce blocage est ma critique de Marguerite Stern dans des stories sur mon compte Instagram.

Au début de l’été 2023, Marguerite a annoncé sur son compte Instagram vouloir se déconnecter d’internet pour les vacances, mais avoir réalisé une dernière interview avant de partir. Sur le coup, pour la soutenir, je lui ai souhaité de bonnes vacances et lui ai assuré que j’écouterai l’interview en entier pour me faire mon propre avis. C’était avant que j’apprenne que Livre Noir, le média l’ayant interviewée, était ouvertement de droite.

J’ai écouté son interview de deux heures en entier, comme promis, et je vous invite à faire de même si vous voulez vérifier mes dires. Comme beaucoup de féministes radicales, cette interview m’a motivée à me désolidariser totalement de Marguerite, surtout que j’étais en train d’apprendre ce qui s’était passé avec Wyylde à ce moment là. D’autres femmes ont fait de même, notamment Mélissa Plaza, qui était signataire du manifeste du site Femelliste. Dans ses stories, elle a montré avoir été basiquement insultée par Marguerite en réponse, et sa signature n’a toujours pas été retirée.

Ce qui a été le plus reproché à Marguerite pendant cette interview, ce sont ses propos racistes, puisqu’elle dit ouvertement que selon elle des raisons biologiques à la violence des hommes migrants ne sont pas à écarter. Mais elle a également eut des propos très laxistes sur la pédocriminalité, disant notamment qu’elle avait pitié des hommes qui sont attirés par les enfants car « on ne choisit sa sexualité » et « ça doit être très très difficile » pour un homme de réaliser qu’il a une attirance sexuelle pour les enfants.

Pour rappel, la pédophilie (je parle ici purement de l’attirance) est une paraphilie, donc quelque chose d’acquis, notamment à cause du visionnage de pornographie. L’attirance sexuelle, contrairement à l’orientation sexuelle, n’est pas innée, elle est influencée par la culture et la vie d’un individus.

Cette interview révèle aussi que Marguerite ne se repose absolument pas sur les écrits des féministes pour peaufiner ses positions. Au contraire, elle affirme ne plus avoir lu de livres de féministes depuis des années parce qu’elle avait l’impression de ne rien en apprendre. Elle préfère lire les livres de misogynes reconnus comme Frédéric Beigbeder ou encore Julien Rochedy, qu’elle défend tout au long de l’interview.

Je vous invite à lire cet article, d’Ana Minski, pour avoir une critique poussée et sourcée de l’interview en question.

L’Amazone Paris réagit

Suite à cette interview, l’Amazone Paris a décidé de se désolidariser totalement de Marguerite. Pour rappel, Marguerite avait créé les Amazones, groupes de collages féministes et anti-féminicides, pour dénoncer les violences subies par les femmes. Elle avait laissé ce mouvement fonctionner en autonomie pour travailler sur d’autres projets, mais les Amazones portaient encore son héritage. L’Amazone Paris a donc annoncé sa dissolution, dans un post qui a le défaut de ne même pas nommer Marguerite mais qui a le mérite d’être une réaction immédiate et responsable. D’autres groupes ont choisis de se renommer, comme l’Amazone Lyon, qui se sont rebaptisées Les Guerrières Lyon.

Cette annonce a été très mal prise par Marguerite, qui s’est connectée au compte de l’Amazone Paris alors qu’elle n’était plus censée y avoir accès, signifiant soit que les mots de passe n’ont jamais été changés, soit que quelqu’un les lui a donnés. Après en avoir profité pour répondre à des messages privés, elle a fais de nombreuses stories pour accuser les Amazones et les féministes radicales d’être stupides, moins cultivées qu’elle, obsédées par elle, etc. Elle a alors supprimé tout le contenu du compte, détruisant par là le fruit de deux ans de travail des colleuses de l’Amazone, et a renommé le compte avant de le supprimer.

A ce jour, je me suis désabonnée de l’Instagram de Marguerite par fatigue de la voir poster des stories sur ses lectures d’hommes misogynes, mais je sais qu’elle est toujours active sur Twitter, bien que je ne sois pas présente sur cette plateforme. Elle tient toujours le site Femelliste avec Dora.

Les Amazones et l’affaire Wyylde

Un dernier élément est à noter dans cette suite d’événements. Comme je l’ai mentionné dans la première partie, lors du post initial de CAPP, certaines militantes de l’Amazone ont accusé CAPP de harcèlement et d’avoir incriminé Marguerite à tort parce qu’elle n’était qu’associée à Dora. J’ai pu lire des screens de messages franchement scandaleux à l’encontre de survivantes.

CAPP a depuis écrit un article complet sur l’affaire Wyylde et les problèmes avec l’Amazone, notamment la demande qu’a fait Anissia Docaigne-Makhroff, membre de l’Amazone, de rendre un don qui avait été fait par Marguerite.

[Cette partie de l’article a été modifiée et le restera jusqu’à ce que j’ai plus d’informations sur un aspect particulier. Les Amazones de Lyon ont publié une vidéo accusant Joana, membre et fondatrice de CAPP, de les harceler notamment suite à l’affaire Wyylde. Je trouve la vidéo douteuse par son montage qui ne permet pas de bien lire les screens censées prouver sa culpabilité, et je n’ai réussi à avoir aucune screen réellement consultable même en demandant aux intéressées. Bien que je trouve ça franchement discutable, plusieurs femmes m’ont assuré que ce harcèlement avait eu lieu, et tant que ce n’est pas réglé je ne veux pas affirmer ici que Joana est innocente ou coupable.De même, il y aurait des accusations que les Amazones n’ont pas de survivantes dans leurs groupes, ce qu’elles démentent fermement, et je ne suis tout simplement pas assez renseignée pour affirmer quoi que ce soit ici. Je tiens à préciser qu’il y a des conflits entre groupes, entre femmes, des conflits dont je ne fais pas partie et qui compliquent mon travail de recherche.]

Dans cette histoire, bien que les Amazones se soient finalement positionnées contre Marguerite Stern, ce positionnement aurait dû être pris dès octobre 2022, quand Marguerite a explicitement soutenu Dora lors des dénonciations du site Wyylde. J’imagine qu’il y a eu des débats en interne dont je n’ai évidemment pas été mise au courant, mais le résultat est là : au final, ne pas soutenir CAPP était révélateur d’un manque de soutien envers les survivantes et de gros problèmes de fonctionnement en interne.

Conclusion

Cet article a été long et difficile à écrire. Long parce que j’ai passé beaucoup de temps à discuter avec des femmes qui ont été impliquées, à lire des posts, des commentaires, des stories, des screens, à essayer de tout remettre à l’endroit. Difficile parce que j’ai l’impression de trahir des femmes que j’admirais en dénonçant leur toxicité et en me désolidarisant totalement d’elles dans la mesure du possible. Mon but ultime est de soutenir les femmes qui font avancer la lutte, et si pour ça je dois me mettre en froid avec certaines, ainsi soit-il.

Je tenais vraiment à remettre les choses à plat car, comme moi, beaucoup de femmes n’ont pas compris ce qui s’était passé, et n’ont pas l’opportunité de discuter avec toutes les femmes impliquées. Ce sont des querelles internes parfois difficiles à gérer et qui, dans l’idéal, devraient être réglées en privé. Mais quand on tombe dans les accusations publiques, les interviews avec l’extrême droite, la défense de la prostitution et la censure des femmes survivantes, garder le silence et vouloir tout régler en privé, c’est être complice.

Le comportement des Amazones dans l’affaire Wyylde m’a énormément déçue quand j’ai enquêté. J’admire le travail des Amazones et leur courage pour aller coller la nuit, tard, en risquant de se faire agresser, arrêter, etc. Mais je me doit de dénoncer leur manque total de soutien aux survivantes de la prostitution, alors même qu’elles se présentent publiquement comme des alliées. Daria Kovankha a d’ailleurs réagi sur son compte personnel pour parler de toute cette problématique.

Tout mon soutien va aux survivantes de la prostitution, qui méritent la protection et l’aide des féministes radicales, pas d’être instrumentalisées par elles pour leurs combats. Je vous laisse sur la conclusion de l’article de CAPP.

Nous avons décidé de rompre tout lien avec les femmes qui font du buzz sur nos vies et nos histoires, quand dans la réalité elles nous méprisent. Nous réalisons bien tard que leurs démarches n’étaient pas sincères. Nous sommes profondément blessées par cette situation et par ces actes.

CAPP, « La face cachée de Wyylde« 

2 réponses sur « Ce blog n’est pas de droite »

Est-ce qu’une « paraphilie » est toujours acquise, est-ce qu’une « orientation sexuelle est toujours innée » ? Sur quelle base peut-on dire qu’il y a une différence entre les deux concepts ? Moi je suis fétichiste de la rondeur (j’adore les femmes rondes et je suis devenu volontairement obèse). Je le suis depuis aussi longtemps que je me souvienne, à une époque où il n’y avait pas Internet et où je n’avais pas la télévision (famille très conservatrice). En revanche, je corresponds avec un homme qui est devenu homosexuel suite à un viol.

L’orientation sexuelle désigne l’attirance pour un sexe ou les deux. Le sexe est central au sexe, je sais que c’est stupide mais il faut bien le répéter. Une paraphilie, comme expliqué dans ma définition du sujet, vient de « para », à côté, c’est à dire que ce n’est pas une attirance pour le sexe mais pour tout le reste (très littéralement). Au fond, on se fiche de si c’était inné, une paraphilie se conditionne, se perds, se fait au cours de la vie, ce qui n’est pas le cas de l’orientation sexuelle : quand on est attiré par un sexe, on le reste.
En revanche, il existe des gens pour qui le sexe de l’autre (ou d’eux-mêmes) devient une paraphilie, c’est le cas de certains autogynéphiles. Par ailleurs je ne crois pas que quiconque devienne gay ou lesbienne suite à des viols, l’homosexualité n’est pas quelque chose qui arrive comme ça. Sinon le nombre de lesbiennes serait tout simplement énorme.

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