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Radfem, critique du genre, ou simplement réaliste ?

Il existe un vrai problème de dénomination dans le climat actuel d’activisme. Beaucoup de gens qui réalisent que l’activisme trans est dangereux se collent d’office le descriptif « radfem » ou « terf » sans savoir ce que ça signifie. Or, le vocabulaire utilisé pour se décrire est important, surtout quand l’adversaire essaye de contrôler le langage. Dans cet article, je vais essayer de décrire rapidement ce que sont les radfems, les terfs et les critiques du genre. Puis je m’attaquerai à une critique du climat global actuel qui force les gens à utiliser des descriptifs qui ne leur conviennent pas en l’absence d’alternative.

Radfem

Radfem est l’abréviation de « féministe radicale ». Ce mot décrit toute femme qui souscris à l’idéologie féministe radicale et dont les actions soutiennent et/ou encouragent la libération des femmes. Le mot est employé par de nombreuses femmes qui ne connaissent pas réellement les tenants et aboutissants de cette forme de féminisme.

Les radfems sont anti-porno, anti-prostitution, anti-kink, anti religions patriarcales, pro séparatisme, critiques du genre, critiques des industries de la beauté et de la minceur, etc. Le féminisme radical provient de la deuxième vague de féminisme et a énormément hérité du Marxisme.

Terf

TERF, abréviation de « féministe radicale excluant les trans », est une insulte utilisée pour faire taire les femmes et les hommes qui critiquent le genre ou le mouvement trans. C’est important de noter ici que le féminisme radical n’exclue pas les trans. Nous excluons les hommes, y compris ceux qui s’identifient comme des femmes. En revanche, les femmes trans-identifiées sont les bienvenues.

En pratique, ce mot vise généralement les lesbiennes, mais tout le monde peut être visé. Le fait que la personne soit ou non féministe radicale n’a aucune importance. Il est aussi appliqué à des hommes. Il existe une version attaquant les hommes gays, TEHM, signifiant « homme homosexuel excluant les trans » (sous-entendu, excluant les femmes trans-identifiées de leur vie sexuelle).

Critique du genre

Abrévié en « GC » en anglais, la critique du genre est inhérente au féminisme radical et à toute analyse féministe digne de ce nom. Critiquer le genre consiste à analyser les rapports sociaux entre les hommes et les femmes, la hiérarchie qui est instaurée entre les sexes et les rapports de pouvoir que cela engendre.

De nombreuses personnes sont critiques du genre sans être féministes. Le mouvement pour les droits des homosexuel·les est ouvertement critique du genre puisque le genre est un outil d’oppression hétéropatriarcal. Cela ne fais pas des hommes gays des féministes. Ce terme est utilisé par des personnes qui critiquent spécifiquement le genre, sans forcément s’attaquer à d’autres problématiques des droits des femmes. Il permet d’éviter la confusion.

Critique du mouvement trans

Terme beaucoup moins utilisé, à tort à mon avis. La critique du mouvement trans, ou mouvement « trans-critical » est un mouvement qui en plus (ou au lieu) de ne critiquer que les normes de genre, critique spécifiquement l’idéologie transgenre. Cette distinction est importante car de nos jours de nombreuses personnes qui se disent radfems ou critiques du genre ne sont en fait critique que des trans. Le but est également de faire une critique du mouvement, et pas juste des individus.

On peut critiquer le genre et le mouvement trans séparément. Mais la critique du genre implique une critique de toutes les normes genrées. Beaucoup de personnes de droite qui critiquent le mouvement trans veulent renforcer le genre et ne sont donc ni GC, ni radfems. Encore une fois, ce terme permet d’éviter la confusion, car les gens qui renforcent les normes de genre en critiquant le mouvement trans ne sont pas les bienvenus dans les luttes féministes.

Quelles autres options ?

Il n’existe actuellement pas de terme pour les gens qui sont simplement capables de voir que le sexe est réel, et c’est un problème. De nos jours, quand une femme est qualifiée de transphobe pour savoir que le sexe existe, elle n’a pas de descriptif auquel se raccrocher. Le seul mouvement politique qui ne joue pas le jeu des trans est le mouvement radfem. C’est donc le seul mouvement auquel s’identifier quand on se fait traiter de TERF en ligne et qu’on ne sait pas ce que c’est.

Cela laisse un vide énorme car, comme je l’ai expliqué plus haut, les radfems sont une classe politique bien précise. Des femmes qui n’ont jamais étudié le féminisme, qui ne critiquent ni le genre ni l’industrie du sexe, qui sont parfois homophobes ou renforcent les normes de genre, vont alors utiliser le label radfem parce que c’est le seul disponible. Il manque une catégorie de personne qui sont apolitiques mais qui sont capable de reconnaître la réalité du sexe.

Il manque un label pour décrire celles qui ont simplement du bon sens, face aux mensonges transactivistes. Parce que ces personnes utilisent les seuls descriptifs disponibles alors qu’ils ne correspondent pas, cela crée une confusion. Et en politique comme dans l’activisme, la confusion n’est pas bonne. Cela amène à croire que les radfems s’opposent à la non-conformité de genre, par exemple. Or, le féminisme radical est fortement opposé au genre, et nous ne voulons pas accueillir des gens qui le renforcent dans notre combat.

Je n’ai pas de meilleur qualificatif à proposer que « réaliste« . Parce que reconnaître l’existence du sexe n’est pas une déclaration politique, c’est une simple observation de la réalité. Ce n’est même pas controversé (ce n’est pas censé l’être, en tous cas). C’est du bon sens.

Conclusion

Je sais que j’ai une obsession pour l’exactitude des mots, et j’écrirai sans doute un jour sur l’importance du langage. Sur la manière dont la langue modifie la manière de penser. Sur les raisons pour lesquelles nous devons nous accrocher aux mots. En attendant, j’espère que cette réflexion sera utiles à certaines. Je vous invite à réfléchir sérieusement sur votre alignement politique et sur vos convictions.

Le manque de mots pour décrire la simple réalisation que le sexe est réel est un vrai problème pour moi. Que ce vide permette à plus de femmes de découvrir le féminisme radical est une bonne chose. Mais que radfem devienne un terme parapluie pour toute femme qui croit en l’existence du sexe est problématique. Connaître l’existence du sexe est quelque chose de basique. Être féministe radicale est bien plus que ça.

Quelle est votre expérience avec ces descriptifs ? Je suis intéressée par votre avis si vous ne connaissiez pas ce vocabulaire. De même si vous vous décrivez avec l’un d’eux.

Sources externes :
(1) Terf est une insulte, site internet de reçus de violences (en français)
Terf is a slur, version originale (anglophone) du site

[kofi]

CC BY-NC-SA 4.0

6 réponses sur « Radfem, critique du genre, ou simplement réaliste ? »

Mercie pour cet article avec lequel je suis 100% d’accord, les qualificatifs sont importants et permettent de cesser les confusions comme tu le dis si bien ! Ou comme VOUS le dites si bien ! Mercie encore pour ce travail essentiel à la compréhension de nos luttes radicales ✊😍❤️

Ravie de te voir de retour… en ce moment, beaucoup de déprime d’être face à un monde pro-idéologie trans… Dès que je mets un pied dehors, ça me frappe de plein fouet. J’ai choisi de rester invisible pour le moment, mais ça bout, intérieurement… Ca finira par ressortir…
Signé : Manu, détrans 😉 qui espère que tu vas bien.

Très heureuse d’avoir de tes nouvelles ! N’hésites pas à m’envoyer un message sur discord si tu as envie de parler et de râler, ça me fera plaisir de discuter avec toi.
J’espère que tu vas bien aussi <3

Mercie !
Personnellement je pense que tout est lié : si on observe que le sexe est réel, ça veut dire qu’on a des yeux et un cerveau. Le reste va avec. Comprendre le patriarcat et le combattre c’est la suite logique. En résumé : de réaliste à radfem il y a une continuité c’est juste une question de temps.

Totalement, mais c’est aussi une question d’éducation et d’accès à la pensée féministe. Il faut du temps et du travail, et j’espère juste que ce blog joue un rôle positif dans l’apport de concepts féministes utiles !

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